Aïta Péa Péa reprend la mer. Cette année , les choses évoluent. Cathy est rentrée en France, je navigue seul et je sors de ma zone de confort. Depuis le temps que nous parcourions ce bel archipel des Açores, j'avais envie de découvrir de nouveaux horizons. Je vais tenter de rallier l'archipel du Cap Vert (Cabo Verde) via les Canaries. Deux étapes qui devraient me permettre de mesurer ce qu'est la navigation en solitaire....
Cela fait dix jours que je surveille la météo pour m'élancer vers les Canaries. Le vent de secteur Est me fait repousser sans cesse le départ, je ne tiens pas à faire du près sur plusieurs centaines de milles. Je décide d'ignorer l'archipel espagnol pour faire route directement sur l'île de Sal, au Cap Vert.
Mardi 29 juillet.
Après les
ultimes course de frais, c'est le grand départ. Les amis m'attendent à
la station service où je fais le plein de gazole, range les aussières,
les pare-battages. Les messages d'encouragement fusent, en allemand, en
anglais, en français et en portugais.
Ciel gris, petit crachin, vent d'Est m'accueillent à la sortie du port.
Le vent variable en force me permettra de vérifier que je sais toujours
prendre des ris et les larguer.
Le vent me réveille à 00h00, je m'apprête à prendre le deuxième ris
quand je découvre les feux d'un cargo et que l'alarme de l'AIS se
déclenche! Je n'ai pas le temps de réduire, je prends la barre pour
éviter l'intrus. Surtoilé, Aïta Péa Péa ne peut pas faire de grand
changement de cap. Nous suivons deux routes presque parralèles, pendant
bien trop longtemps à mon goût; je ne peux pas ralentir pour le laisser
passer, je peine à tenir le bateau surtoilé, mais ça finit par passer.
J'entends quelque chose tomber dans la cuisine, j'irai voir plus tard.Je
peux enfin prendre le ris et retourner me coucher. Je cherche ce qui
avait chuté dans la cuisine et je découvre..... un exocet (poisson
volant) devant la cuinière! On ne pouvait imaginer plus direct! un
deuxième suivra dans le cockpit, ils finiront tous deux en rillettes.
Les jours suivants, de petits calamars aponteront également, mais sans crainte de gaspillage, je les remettrai à l'eau.
Le
deuxième jour, malgré la succession de manoeuvres dues à un temps très
changeant, je commence à trouver le temps long... Le bateau marche bien,
nous totalisons 124 milles pour les premières 24 heures.
Les journées se suivent et se ressemblent et, bizarement, je ne m'en
rends plus compte. Le temps coule doucement et l'ennui que j'éprouvais
au début a complètement disparu.
Un matin, réveillé par de fortes accélérations, je bondis sur le pont.
Sous génois seul, le bateau a été surpris par un grain. Il part au lof,
j'essaie de controler en reprenant la barre, impossible. Le bateau part
au lof, bien que la dérive soit relevée, le génois se dévente en
imposant d'impressionantes secousses au gréement. J'essaie de
l'enrouler, impossible; la seule solution est de l'ammener. Je laisse
filer la drisse, la voile tombe dans l'eau, le bateau retrouve un
semblant de calme; il ne me reste plus qu'à remonter la voile qui
chalute sous le bateau. Tout cela, pour un grain d'à peine un quart
d'heure, et trois quarts d'heure d'effort pour le sortir de l'eau!
Le grain est passé, je renvoie le foc qui nous permet d'atteindre la
vitesse extraordinaire de 4 noeuds!
Au cinquième jour de mer, des nappes d'algues à la dérive et un oiseau;
les anciens y auraient vu un présage à l'apparition d'une terre, mais
impossible trop loin. Le GPS nous le dit!
Les milles s'additionnent à un rythme soutenu dans le sillage de Aïta
Péa Péa.
Pour éviter d'arriver de nuit, je réduis la vitesse en sous-toilant. Les
mouvements du bateau deviennent inconfortables à cause de la houle qui
nous fait rouler d'un bord sur l'autre.
A l'aube du dixième matin, je devine la côte alors qu'elle est à moins
de 6 milles!
A 10h, je prends un coffre à Porto de Palmeira.
Distance
parcourue : 1247,54 milles
Vitesse moyenne : 5,3 kn
Vitesse max : 11,46 kn
Finalement,
dix jours de mer (pas tout à fait) ce n'est pas long! Maintenant, il
reste à découvrir cet archipel.